Gueules de bois

Contemplatif contrarié, amoureux de bandes dessinées et de photographies, du plus loin qu’il s’en souvienne Kiki a toujours aimé regarder derrière les choses, en deçà ou au-delà de l’évidence, du simple regard posé, en passant, sur le monde qui nous entoure.

Kiki aime observer la nature au téléobjectif ou en macrophotographie. À l’échelle de l’œil humain, cela l’intéresse peu.

Ses illustrations sont nées de cette vision rapprochée, avec un appareil photo, au plus près du végétal, de souches d’arbres où il a vu surgir ces formes fantastiques, monstrueusement belles à ses yeux, qu’il a ensuite repris en dessin pour en faire des portraits à part entière.

Dodéca quoi ???

Le dodécaèdre est un volume à douze faces, et le verbe dodécahoroportospecter signifie donc « voir midi à sa porte ».

Les cadrans solaires sur les portes des maisons d’autrefois indiquaient l’heure, à condition qu’il y ait du soleil. Ainsi la lumière et l’ombre influençaient-elles les heures qu’on lisait !

Peut-on transposer ce phénomène à notre perception ? Oui, dans la mesure où notre environnement et notre culture manipulent nos cinq sens à leur guise. Sans compter le fameux sixième qui ajoute éventuellement une dimension personnelle voire intime à la chose regardée.

Dans le paysage urbain, les bâtiments, les rues et même les parcs ont des formes fixes dont les ombres et lumières accentuent les lignes et rondeurs. Mais dans un cadre rural, la présence plus importante de la nature rend les dessins plus mouvants, grâce au vent notamment et à la disparition -ou presque- des lumières artificielles. C’est une grammaire bien différente qui donne à un végétal une figure flamboyante et joyeuse au printemps, tandis qu’elle le frappe de morosité en hiver. En ville, des projets fleurissent un peu partout dans le but de reverdir les espaces, et c’est une belle note d’espoir dans ce monde sali. Mais les visions hivernales citadines comportent de toute façon un très grand nombre de surfaces bitumées, de poteaux, de panneaux lumineux et de signaux colorés qui absorbent les plantes lorsqu’on scrute l’ensemble. Notre environnement campagnard offre plus d’occasions d’observer et admirer de simples branches, des racines, des souches. Celles qui sont illustrées ici sont de vrais paysages où chacun décèlera ce qui le touche, selon sa propre histoire.

Et vous, qu’avez-vous vu dans ces tableaux ? Vous êtes sûrs ?

Regardez encore…

Texte de Pascale Ducamin